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La voix des fantômes

Proliférations

La diversité des rituels funéraires à travers le monde nous touche et nous fascine, en même temps qu’elle révèle des coutumes surprenantes. Les anthropologues et les historiens nous montrent l’extraordinaire variété des pratiques : crémations, décorations d’ossements, danses rituelles, expositions de cadavres, sépultures collectives ou dispersées. Ces traditions reflètent, avec un constant renouvellement d’étonnement, l’ingéniosité et la créativité avec lesquelles chaque société traite la mort. Ce domaine de pratiques est d’ailleurs au cœur des études anthropologiques : la façon dont les humains, malgré leur diversité, organisent et ritualisent la mort dévoile des aspects profonds de leur culture.

Pourtant, aborder les fantômes d’un point de vue anthropologique s’avère bien plus complexe. Contrairement aux pratiques funéraires bien définies, les fantômes échappent aux explications simples et aux règles établies. Leurs manifestations et les croyances qui les entourent ne suivent pas de logiques précises, ni même de frontières culturelles claires. D’une culture à l’autre, il est difficile de catégoriser les types de fantômes ou de cerner exactement les croyances autour d’eux. Dans certaines sociétés, ces êtres apparaissent lorsque des injustices non réparées les retiennent, tandis que dans d’autres, ils semblent incarner des peurs plus diffuses. Les fantômes, par leur nature incertaine, défient les efforts de classification, car ils touchent à des dimensions du vécu qui restent mouvantes et singulières.

Les fantômes échappent également aux clivages culturels et sociaux,

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Vous trouverez aussi une réflexion de spiritualités Magazine :

  • Les fantômes comme acteurs dans un contexte social et culturel
  • La transformation du défunt en interlocuteur
  • L’énaction comme processus de (ré)invention de la mort et du souvenir
  • Les fantômes comme miroirs de l’énaction collective
  • Les fantômes comme manifestant des qualités qui dépassent les intentions des vivants.

(suite…)

Prendre soin de mes parents qui vieillissent

L’ouvrage Prendre soin de mes parents qui vieillissent d’Annick Taquet-Assoignons aborde une problématique universelle mais souvent négligée : le rôle de l’enfant aidant face à la vieillesse et la dépendance de ses parents. L’intention de l’auteure est claire : offrir des outils de réflexion et de gestion à ceux qui se retrouvent dans cette position, souvent imposée et peu préparée. Voici un résumé détaillé de l’intention, du message, de l’approche et de la méthode de l’auteure, ainsi que sa singularité :

Annick Taquet-Assoignons vise à sensibiliser et accompagner les “enfants aidants”, ceux qui prennent soin de leurs parents âgés et souvent dépendants. Elle cherche à reconnaître la complexité émotionnelle et physique de ce rôle, tout en offrant des outils concrets pour mieux l’appréhender. L’auteure souhaite prévenir l’épuisement et les difficultés psychologiques qui en découlent, en mettant l’accent sur l’importance de protéger ses propres ressources.

Le message central du livre est que la prise en charge d’un parent vieillissant n’est pas une tâche simple, ni naturelle, et qu’elle peut avoir un impact profond sur la vie personnelle, émotionnelle et sociale de l’aidant. Il est essentiel de ne pas négliger son propre bien-être, tout en assumant cette responsabilité. Le livre propose de réhabiliter ce rôle, souvent vu comme un devoir, en montrant qu’il est possible de trouver un équilibre entre l’aide apportée au parent et le respect de ses propres limites.

L’approche de l’auteure est à la fois personnelle et professionnelle. Elle utilise des témoignages, des expériences personnelles et son expertise en psychologie pour aborder les multiples facettes du rôle d’aidant. Le livre est structuré pour guider les lecteurs dans une réflexion progressive sur leur propre situation, en posant des questions à chaque étape pour les amener à prendre du recul sur leurs responsabilités.

Chaque chapitre aborde une thématique liée à la prise en charge d’un parent vieillissant, suivi de questions introspectives et de conseils pratiques.

 Cette méthode vise à permettre aux aidants de mieux comprendre leur situation, d’identifier les domaines où ils se sentent en difficulté et d’appliquer des stratégies concrètes pour améliorer leur quotidien. L’auteure met aussi en avant des outils spécifiques, comme l’échelle de Zarit, pour évaluer la charge mentale et physique.

  1. La perte d’autonomie du parent
  • Thématique : La perte d’autonomie du parent peut être progressive ou soudaine, causant un bouleversement familial.
  • Réponses essentielles :
    • L’importance de préserver la dignité et l’autonomie du parent, même en situation de dépendance.
    • La nécessité pour l’enfant aidant de trouver un équilibre entre l’aide apportée et la non-infantilisation du parent.
    • Recommandation de valoriser les petites réussites du parent plutôt que de se focaliser sur ses échecs​ .
  1. Un « fardeau » trop lourd à porter ?
  • Thématique : Le sentiment de fardeau ressenti par les aidants, souvent écrasant.
  • Réponses essentielles :
    • Utilisation de l’échelle de Zarit pour évaluer l’ampleur du fardeau.
    • L’aidant est encouragé à revenir régulièrement sur cette évaluation pour mieux comprendre sa situation émotionnelle et matérielle​.
  1. Des pertes et des deuils
  • Thématique : Les pertes (physiques, émotionnelles) et les deuils associés à la maladie du parent.
  • Réponses essentielles :
    • Chaque étape de la maladie entraîne une nouvelle forme de deuil.
    • L’aidant doit s’adapter à ces pertes tout en évitant de se laisser submerger par la tristesse​ ​ .
  1. Pourquoi moi ?
  • Thématique : Pourquoi certains enfants prennent la responsabilité principale d’aidant.
  • Réponses essentielles :
    • Les motivations des enfants aidants varient (solidarité, sentiment de dette, désir de reconnaissance).
    • La perception de ce rôle peut être influencée par des attentes familiales ou sociétales​ .
  1. Et lorsque je suis un professionnel de la santé ?
  • Thématique : Le cas des aidants qui sont aussi professionnels de la santé.
  • Réponses essentielles :
    • Distinguer son rôle de soignant et celui de proche est difficile.
    • L’importance de déléguer certaines tâches pour préserver la relation parent/enfant​ .
  1. Des besoins ?
  • Thématique : Reconnaître les besoins des aidants.
  • Réponses essentielles :
    • Les besoins de l’aidant sont souvent ignorés ou mis de côté.
    • Il est crucial de reconnaître ces besoins pour éviter l’épuisement et maintenir un équilibre​ .
  1. Où et comment m’informer ?
  • Thématique : Les sources d’information pour les aidants.
  • Réponses essentielles :
    • Rechercher des ressources et des informations sur les aides disponibles peut soulager la charge mentale et logistique de l’aidant.
  1. Gérer mes émotions
  • Thématique : La gestion des émotions des aidants, souvent contradictoires.
  • Réponses essentielles :
    • Reconnaître et accepter ses émotions (colère, tristesse, amour) est essentiel pour préserver une relation saine avec le parent malade.
    • La gestion des émotions passe par la pleine conscience et des techniques comme l’Analyse Transactionnelle​ ​ .
  1. Développer mon assertivité
  • Thématique : L’importance de l’assertivité dans la relation aidant/parent.
  • Réponses essentielles :
    • L’assertivité permet de poser des limites et de protéger ses propres besoins tout en respectant ceux du parent​

 

Ce qui distingue cet ouvrage, c’est l’attention particulière portée à l’aspect émotionnel et psychologique du rôle d’aidant. L’auteure n’hésite pas à aborder les sentiments négatifs, comme la colère, la culpabilité, et la tristesse, tout en soulignant que ces émotions sont normales et doivent être reconnues. Sa vision se démarque par l’idée que devenir l’aidant de son parent n’est pas seulement un devoir filial, mais un chemin qui demande une adaptation psychologique profonde. Enfin, elle insiste sur l’idée que ce rôle peut révéler des aspects inattendus des relations familiales, tant positifs que négatifs, et qu’il est important de se préparer à ces changements.

Questions clés à se poser en tant que lecteur

  1. Comment me suis-je retrouvé dans ce rôle d’aidant ? Est-ce une obligation ou un choix ?
  2. Quels sont les impacts émotionnels que ce rôle a sur ma vie quotidienne ?
  3. Ai-je identifié mes limites dans ce rôle ? Comment puis-je les respecter sans culpabiliser ?
  4. Comment équilibrer mon besoin de prendre soin de mes parents tout en préservant mon propre bien-être ?
  5. Comment puis-je demander de l’aide ou déléguer certaines responsabilités sans me sentir dévalorisé ?
  6. Est-ce que j’accepte ou refuse la réalité de la maladie et de la dépendance de mon parent ?
  7. Comment gérer mes relations avec les autres membres de ma famille autour de cette responsabilité partagée ?
  8. Quelles stratégies puis-je mettre en place pour éviter l’épuisement émotionnel et physique ?

La spiritualité dans ce livre

Dans Prendre soin de mes parents qui vieillissent, la spiritualité apparaît sous diverses formes, particulièrement dans le lien entre l’âme et le corps. L’auteur, Annick Taquet-Assoignons, consacre un chapitre intitulé Les soins de l’âme et du corps pour aborder cette dimension. Le message central de ce chapitre est que la prise en charge d’un parent vieillissant ne concerne pas seulement le physique, mais aussi l’aspect spirituel et émotionnel de l’aidant et du parent.

L’ambivalence

L’auteure explore l’idée d’ambivalence émotionnelle, une coexistence simultanée de sentiments opposés. Cette ambivalence, dit-elle, est omniprésente chez l’aidant, qui ressent à la fois de l’amour et de la frustration, de la tendresse et de l’épuisement. Elle compare cette ambivalence à une lutte intérieure entre un “ange” et un “démon” (référence à Milou dans Tintin), des voix qui symbolisent les forces opposées dans le psychisme de l’aidant. Cette lutte révèle l’aspiration à prendre soin et à changer tout en se sentant prisonnier de ses obligations .

La parole intérieure et la pleine conscience

Le livre incite les aidants à se libérer de leur parole intérieure constante, ce flux de pensées qui accompagne leur quotidien et peut devenir oppressant. L’auteur propose de cultiver la pleine conscience (mindfulness), une pratique spirituelle qui permet de se concentrer sur l’instant présent, de mettre de côté les pensées négatives et de retrouver une forme de paix intérieure. Cette approche, bien que simple en apparence, exige une attention quotidienne, en particulier pour ceux qui, comme les aidants, vivent des situations émotionnellement et physiquement éprouvantes .

La méditation, intégrée dans la pratique de la pleine conscience, est également proposée comme un moyen de se reconnecter à soi-même et de prendre du recul par rapport aux difficultés du quotidien. En faisant cet “arrêt sur image”, les aidants peuvent mieux comprendre leurs insatisfactions et ainsi puiser dans leurs ressources internes pour trouver un équilibre entre leurs pensées positives et négatives .

La bienveillance envers soi-même

Dans une approche profondément spirituelle, l’auteure exhorte les lecteurs à faire preuve de bienveillance envers eux-mêmes, à accepter leurs erreurs et à ne pas se juger trop sévèrement. La quête de perfection, souvent présente chez les aidants, est une source de souffrance, et la pratique spirituelle devient ici un moyen de renouer avec l’acceptation de soi et la réalité de ses limites .

Une histoire imaginée à la lecture de ce livre

En un temps lointain, dans une maison nichée entre collines et forêts, vivait une femme prénommée Catherine, qui autrefois, avec une gaieté naturelle, trouvait le monde empli de mélodies. Pourtant, la lumière de sa joie s’était estompée, car un fardeau invisible s’était posé sur ses frêles épaules : sa mère, autrefois vive et alerte, était désormais prisonnière des rets de l’âge. Catherine, veuve de longue date et mère de deux fils, se tenait, seule et résignée, dans l’ombre du devoir filial. Son cœur était lourd, oppressé par les devoirs quotidiens qui s’imposaient à elle depuis que la déchéance physique de sa mère avait pris le pas sur leur relation d’antan.

Chaque matin, le chant du coq annonçait une nouvelle journée de lutte, non contre un dragon ou un chevalier ennemi, mais contre le temps, ce dévoreur implacable. “Autrefois,” pensait-elle, “je pouvais savourer des heures paisibles, occupée à mes propres affaires. Mais désormais, ma vie n’est plus la mienne.” Ses rêves d’indépendance, longtemps construits avec soin, s’étaient dissipés comme la brume au lever du jour. Désormais, elle passait ses journées à s’occuper de sa mère, tout en contemplant de loin ces heures précieuses qu’elle espérait un jour retrouver.

Un matin d’hiver, alors que les premières lueurs du jour teintaient les cimes des arbres, Catherine s’en allait chercher sa mère, celle-ci alitée et incapable de se lever seule. Tandis qu’elle se penchait sur le corps frêle et recroquevillé, elle sentit une ombre s’étendre dans son cœur, une colère sourde qui, jusque-là, avait été refoulée. Cette colère, cette frustration, n’était point dirigée contre sa mère, mais plutôt contre la destinée cruelle qui avait inversé les rôles entre elles.

Sa mère, autrefois maîtresse de maison et pilier de la famille, se tenait là, dépendante, fragile, semblable à un enfant. “Pourquoi dois-je porter seule ce fardeau ?” se demandait Catherine. Elle n’avait point de frères ou de sœurs avec qui partager cette tâche harassante. “Je n’ai jamais imaginé que ma vie, celle que j’avais envisagée sereine et libre, se transformerait en une suite interminable de soins et de sacrifices.”

Les semaines passaient, et la tension entre les deux femmes ne faisait que croître, malgré le silence qui régnait dans la demeure. Ce silence, tel un poison, s’insinuait dans chaque recoin de leur relation. Catherine voulait aimer sa mère comme autrefois, mais chaque soin apporté, chaque heure passée à la toilette, à préparer les repas ou à l’assister pour ses besoins les plus élémentaires, lui semblait une perte de sa propre vie, un coup de poignard dans ses propres rêves. “Comment supporter cette charge sans perdre mon âme ?” pensait-elle chaque nuit avant de sombrer dans un sommeil agité.

Puis, un jour, alors qu’elle s’évertuait à maintenir les apparences de la sérénité, la colère refoulée éclata. “Mère,” dit-elle avec un ton qu’elle ne se reconnaissait point, “je ne puis plus porter ce poids seule. Pourquoi suis-je la seule à m’occuper de toi ? Ai-je été désignée ainsi par quelque sortilège ? Où sont les autres, ceux qui devraient aussi veiller sur toi ?”

Sa mère, ébranlée par ces mots, la regarda avec des yeux emplis de tristesse et de désarroi. “Ma chère fille,” répondit-elle avec une voix tremblante, “je n’ai jamais voulu que tu deviennes ma seule gardienne. Mais le destin nous a piégées toutes deux. Je suis prisonnière de mon corps défaillant, et toi, tu es prisonnière de ton devoir envers moi.”

Ces paroles résonnèrent dans le cœur de Catherine comme une cloche lourde de sens. La rage s’effondra, laissant place à une immense tristesse. Elle comprit alors que sa mère aussi était enchaînée par cette situation. Elles étaient toutes deux captives, non pas l’une de l’autre, mais des aléas impitoyables du temps.

Les jours qui suivirent, Catherine chercha des réponses dans les écrits anciens et dans les conseils de sages, espérant découvrir comment alléger ce fardeau partagé. Elle apprit qu’il était possible de demander de l’aide, de ne point porter seule cette charge. Et, bien que la culpabilité ne disparût point totalement, elle trouva des moyens de déléguer certaines tâches à d’autres, pour que son cœur puisse, ne serait-ce que pour quelques instants, retrouver une once de légèreté.

Ainsi, l’histoire de Catherine et de sa mère devint une leçon pour ceux qui, tels des chevaliers affrontant des batailles invisibles, luttaient contre l’usure des années et les responsabilités imposées par le destin.

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